Re: [EGD-discu] Des pistes pour les ajouts sans dégrader les usages notables

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Jeudi 4 février 2016 09:02:11, Laurent <laurent4ml@xxxxxxx> a écrit :

> J’ai cru comprendre qu’au Canada, les francophones ne se précipitaient pas pour utiliser le clavier multilingue de la nouvelle norme et préféraient continuer avec l’ancien clavier canadien pour le français, pas seulement pour les raisons de conservatisme, mais aussi parce que la nouvelle disposition n’est pas si pratique que ça. Je pense que l’AFNOR est consciente de ce risque.

Jeudi 4 février 2016 16:37:53, Jean-Christophe Groult <jcgroult@xxxxxxxxx> a répondu :

> La « nouvelle » norme n’est plus si nouvelle que ça (1992) et c’est vrai que le clavier ACNOR n’a pas eu un grand succès. En effet la disposition n’est très pratique. À mon avis cela vient d’une part d’une conception trop compliquée : certaines touches ont jusqu’à 5 couches (alors que d’autres n’en ont que 3). Et d’autre part pour gérer ces couches supplémentaires ils ont du détourner le Contrôle droit, ce qui réduit l’ergonomie du clavier.

Le clavier Canadien multilingue standard est une implémentation précoce de la norme internationale ISO/CEI 9995, laquelle rappelons-le a été développée depuis 1985 et publiée en 1994, soit deux ans après le clavier ACNOR. Or l’auteur du clavier canadien standard, Alain LaBonté, « a été dès 1988 (peu après donc l’adoption d’ISO Latin-1) expert-délégué canadien officiel au groupe de travail 3 du SC2 (sur le codage de l’information) »[1], et il sera le rédacteur d’une révision d’ISO/CEI 9995 au début ne notre millénaire. Dans cette norme, le sélecteur de groupe est tout sauf Contrôle droite :

― soit un appui simultané sur Maj et AltGr (appelés sélecteur de groupe 2 et 3 respectivement) dans un ordre quelconque [ce qui explique au passage pourquoi il n’y a pas de niveau 4] pour fonctionner comme un sélecteur de groupe rémanent, du même effet qu’une touche morte – et qui a effectivement été implémenté comme telle dans la disposition de clavier allemande T2 faite à l’aide du MSKLC par son auteur lui-même, où le sélecteur de groupe est actuellement (V1.05) AltGr+^ (symbole multiplication, touche E00), ce pourquoi cette implémentation est dite juste « compatible gravure » (par opposition à « conforme ») ; tandis que sur une autre variante antérieure mais toujours existante – le clavier Europe – il est AltGr+d (symbole diamètre) ;

― soit optionnellement une touche supplémentaire adjacente à AltGr, à penser entre AltGr et Windows droite. Ajouter des touches physiques a été l’idée d’ISO/CEI 9995 depuis les origines, et je pense que c’est l’une des raisons principales de son échec. Que cette touche coïncide avec Ctrl droite est dû à l’implémentation de la norme par Microsoft et plus précisément par son développeur de dispositions de clavier Ian James.

À mon avis Ian James a dû faire au mieux face au fait que les normalisateurs conçoivent des claviers à un niveau d’abstraction trop élevé pour être efficace, qu’ils ne se préoccupent pas de prendre connaissance des fonctionnalités que les éditeurs d’OS ont déjà prévues pour les claviers. Cette méthode de travail explique à la fois le décalage entre les normes de clavier et les moyens techniques, et le manque d’idées sur comment faire des claviers performants et faciles à utiliser. Les sanctions ne se font pas attendre, tant du côté des utilisateurs sous forme de rejet, que de la part des éditeurs qui doivent en avoir marre de se voir demander la lune alors que les richesses de la terre sont à portée (en filant la métaphore), et je suis convaincu qu’ils savent très bien comment on pourrait faire de bons claviers, mais soit ils attendent en vain que les normalisateurs leur demandent conseil, soit cʼest aux informaticiens dans les pays bénéficiaires de s’en occuper à fond, car autrement Microsoft se verrait face à une masse de travail énorme difficile à gérer puisqu’ils rentreraient dans le rôle des normalisateurs.

C’est pour cela que moi je dis que les normalisateurs doivent mettre la main à la pâte en normalisant des claviers qu’ils savent faire, et en faisant les claviers qu’ils normalisent. En commençant par les faire pour Windows (91 % des PC, API figées), puis en les portant ou faisant porter vers les autres OS. Mais cela ne signifie nullement qu’il faudrait se limiter à ce que le MSKLC gère par son interface graphique, notoirement limitée – non parce que Microsoft voudrait qu’on en reste là, mais juste pour dépanner la NSA, qui n’est pas payée par l’État pour programmer des claviers en C, mais pour faire des transcriptions dans des langues exotiques sans faire fuiter lesquelles exactement. Le MSKLC ne représente nullement les dernières volontés de Microsoft pour tous les claviers du monde. C’est une facilité pour se dépanner, et c’est comme telle que Karl Pentzlin l’a utilisé. Au delà, Microsoft apprécie l’enthousiasme de ceux qui développent des concepts de clavier plus performants, et on vous souhaite personnellement du succès avec votre projet.

À bon entendeur…

> L’Afnor en a conscience.

Et elle a promis de ne pas aller jusqu’à la relative complexité du clavier canadien, grâce notamment à des options dégagées en coopération avec Karl Pentzlin.

Des options, il y en a un paquet sous Windows, et cela donne des claviers assez sympas. Windows reste probablement le facteur limitatif car Linux peut générer par touche morte plus d’une unité de code. Mais Windows gère les touches mortes chaînées – et avec elles, l’émulation compose – contrairement à ce que pensait Karl Pentzlin et moi-même au début. Moi aussi je m’en suis plaint amèrement et pour rien puisque ça ne manque pas du tout !

Et il y a encore un certain nombre d’autres options très utiles sous Windows (et les autres OS). Je ne suis pas sûn que le rédacteur (et concepteur !) des normes allemande et internationale actuelles ait pareillement indiqué ces options. Le principal obstacle qui empêche de les utiliser, reste sans doute que ces options ne sont pas (ENCORE) prévues dans ISO/CEI 9995… qui en maigre compensation prévoit d’autres options. Jusqu’à présent, ces dernières ont tout l’air d’être soit irréalisables, soit pas assez séduisantes.

On espère que la France saura prendre son destin en main, et mener à son terme la démarche qu’elle avait engagée il y a plus de trente ans : se doter, et doter le monde, d’un schéma de disposition de clavier intelligible, efficace et performant.

À mon avis la réussite est à portée, mais logiquement elle conduirait l’Allemagne à re-réviser sa norme nationale. J’espère que le blocage ne viendra pas de là. Ce serait la énième fois qu’un pays d’Europe fasse tourner les autres en bourrique (bien que maintenant ce soit à un niveau plus subtil).

Marcel

P.S. : Désolé que ce mail soit aussi long.

[1] André, J. (1996). ISO-Latin-1, norme de codage des caractères européens ? trois caractères français en sont absents ! - CG_1996___25_65_0.pdf. Page 73 (11 sur 15 du PDF). Consulté 22 septembre 2014, à l’adresse http://cahiers.gutenberg.eu.org/cg-bin/article/CG_1996___25_65_0.pdf




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